Pluies cévenoles, épisodes méditerranéens… Ces termes répandus dans les médias correspondent à des situations météorologiques précises. Que désignent-ils ? Quels épisodes méditerranéens ont marqué ces dernières années ?
Une localisation particulière
Trois à six fois par an en moyenne, de violents systèmes orageux apportent des précipitations intenses sur les régions méditerranéennes. L’équivalent de plusieurs mois de précipitations tombe alors en seulement quelques heures ou quelques jours.
Les épisodes méditerranéens sont liés à des remontées d’air chaud, humide et instable en provenance de Méditerranée qui peuvent générer des orages violents parfois stationnaires. Ils se produisent de façon privilégiée en automne, moment où la mer est la plus chaude, ce qui favorise une forte évaporation.
Le terme « cévenol » est souvent employé abusivement pour caractériser tout épisode apportant des pluies diluviennes sur les régions méridionales. S’il est vrai que le massif des Cévennes est réputé pour l’intensité des épisodes qui l’affectent (d’où le qualificatif), des situations fortement pluvieuses frappent tout l’arc méditerranéen et sont donc loin d’être exclusivement « cévenoles ».
Des situations météorologiques particulières
Les situations météorologiques génératrices de fortes pluies sur les régions méditerranéennes sont de deux types :
- celles où l’influence du relief est prépondérante : l’exemple cévenol illustre parfaitement l’influence du relief sur les régimes de précipitations. Lorsque qu’une masse d’air chaud et humide, poussée par des vents de basses couches, vient buter contre une barrière montagneuse, elle se soulève le long du relief. Avec l’altitude, elle se refroidit et la grande quantité de vapeur d’eau qu’elle contient se condense avant de finir par retomber sous forme de fortes précipitations. Les Cévennes ne sont pas le seul relief proche de la mer: des précipitations avec forçage orographique concernent également les Pyrénées, les Alpes ou la Corse. Le dernier épisode cévenol majeur date de septembre 2020, où il est tombé plus de 500 mm** en 12 h, le 19, à Valleraugue dans le Gard ;
- les situations orageuses liées exclusivement aux conditions météorologiques : ces systèmes orageux ne couvrent alors pas forcément des zones très étendues mais génèrent de très fortes intensités de précipitations (dépassant souvent les 100 mm/h). Ils peuvent parfois se régénérer (on parle alors de cellules stationnaires) en créant une vaste bulle d’air froid de surface, qui agit alors comme un relief en soulevant la masse d’air toujours au même endroit. De tels épisodes ont été observés par exemple le 22 septembre 1993 à Aix-en-Provence, le 6 septembre 2010 à Cavaillon, le 1er décembre 2003 à Marseille, le 29 septembre 2014 et le 23 août 2015 à Montpellier.
- Le 3 octobre 1988 à Nîmes : 420 mm** tombent en moins de 12 heures, c’est-à-dire l’équivalent de 6 mois de pluie, concentrés sur Nîmes.
- Le 22 septembre 1992 à Vaison-la-Romaine : ce sont près de 300 mm (l’équivalent de 3 à 4 mois de précipitations) qui se sont déversés en 5 heures seulement en amont de Vaison-la-Romaine, provoquant une crue éclair de l’Ouvèze.
- Le 26 septembre 1992 : 129 mm en 2 heures 30 à Granès près de Rennes-les-Bains dans la haute-vallée de l’Aude et 292 mm mesurés à Narbonne.
- Toussaint 1993 : 906 mm en 2 jours sont relevés au Col de Bavella en Corse-du-Sud don 780 mm le 31.
- Le 12 novembre 1999, inondations de l’Aude : la zone la plus sévèrement touchée est la région des Corbières où il est tombé à Lézignan 620 mm en 36 heures (soit plus des 2 tiers d’une année habituelle de pluie).
- Le 8 septembre 2002 dans le Gard : 687 mm à Anduze en moins de 36 heures (les 2 tiers d’une année habituelle de pluie).
- 15 juin 2010 dans le Var : 461 mm à Lorgues, près de Draguignan en moins de 12 heures (soit l’équivalent de la moitié de ce qui tombe habituellement en une année).
- 1-5 novembre 2011 en Ardèche : en 5 jours, les cumuls ont atteint les 1 000 mm sur l’Ardèche.
- L’automne 2014 s’est distingué par la persistance remarquable de situations fortement perturbées sur les départements méditerranéens des Cévennes et de la Côte d’Azur, conduisant à un nombre record d’épisodes (depuis 1958) entre le 16 septembre et le 30 novembre (9 épisodes).
- Le 3 octobre 2015, l’ouest des Alpes Maritimes est touché : 195 mm à Cannes dont 175 en 2 heures et 178 mm à Mandelieu dont 156 mm en 2 heures. Cet épisode démontre que ce n’est pas seulement la hauteur totale des précipitations qui importe, mais aussi les intensités maximales atteintes et la vulnérabilité des territoires concernés.
- Les 14 et 15 octobre 2018, le département de l’Aude a connu des pluies diluviennes et été placé en vigilance rouge pluie-inondation. 14 personnes y ont péri. Les cumuls en 12 heures ont été particulièrement remarquables : 295 mm à Trèbes (dont 244 mm en 6 heures et 111 mm en 2 heures), 212 mm à Arquettes-en-Val. Cet épisode méditerranéen a aussi affecté les départements des Pyrénées-Orientales, du Tarn et de l’Hérault où de très forts cumuls en 2 jours ont été relevés : 366 mm à La Salvetat (Hérault) , 299 mm à Fraisse-Murat (Tarn).
- Les 19 et 20 septembre 2020 dans le Gard. Des précipitations extrêmement importantes se sont abattues sur les Cévennes gardoises au nord-ouest du département, sur les secteurs du Viganais, de l’Aigoual et de Saint-Jean-du-Gard. Cumuls de plus de 500 mm localement.
- Les 2 et 3 octobre 2020 dans les Alpes Maritimes. La tempête Alex a déclenché un épisode méditerranéen sans précédent. Des cumuls de pluie exceptionnels ont été enregistrés dans l’intérieur des Alpes-Maritimes et l’extrême nord-est du Var. Les pluies diluviennes, atteignant localement 500 litres par mètre carré, ont engendré des crues dévastatrices du Var et des cours d’eau tributaires. On a ainsi mesuré 500 mm de pluies à Saint-Martin-Vésubie en 24 heures, soit un nouveau record tous mois confondus en 24, 48 ou 72 heures à l’échelle départementale.